Cette semaine on va parler philosophie! Ca fait bien longtemps! J'ai pourtant beaucoup étudié la philo au lycée, matière qui m'intéressait énormément et comme j'étais en L, j'en avais 8H/semaine. Pourtant, en dehors des cours, je n'ai jamais beaucoup lu d'ouvrages philosophiques pour mon plaisir, mais plutôt pour enrichir mes cours. Certaines fois c'était pour mon plaisir, et de nature curieuse, je me suis un peu penchée dessus, mais certains thèmes et livres étant parfois un peu difficiles d'accès, ça fait bien longtemps que je ne me suis pas penchée dessus. En 2018, lorsque Irène Bachler a sorti son ouvrage intitulé "La laïcité | Faire la paix", je me suis tout de suite dit qu'il fallait que je me le procure. Pas tant par rapport au sujet, mais parce qu'elle est prof de philo dans le lycée où j'ai étudié! Une façon de la soutenir. Le livre est assez épais, plus de 320 pages, je repoussais donc le moment de le lire, jusqu'à dernièrement, en rentrant de Corée, et avant de passer un entretien important dans le domaine de la lecture justement, je me suis dit que c'était l'occasion parfaite.
Le livre est divisé en 10 chapitres, et d'une introduction et conclusion. Un format assez similaire à des rédactions de philosophie. Comme si les 10 chapitres étaient un peu la thèse, l'antithèse. C'est le seul livre je pense, dont j'ai corné les pages, afin de pouvoir retrouver certaines citations et concepts pour rédiger cet article. Car comme il s'agit d'un ouvrage de philosophie et pas d'un roman classique, à résumer... Compliqué.
Elle commence le livre avec le premier chapitre qui nous plonge directement dans le contexte. A quel point la laïcité est méconnue et mal comprise. Employée à tort et à travers pour justifier de tout, mais pas forcément réellement comprise de tous. Elle nous dit que non, la laïcité n'est pas anti-religieuse, elle est justement liberté, à n'importe qui d'être ce qu'il est dans sa foi. Elle accepte toutes les religions, mais s'en dissocie. En effet, l'Eglise et l'Etat sont séparés depuis la loi de 1905, il n'y a donc pas de religion d'Etat. Chacun exerce le culte qu'il souhaite. La laïcité est aussi souvent comprise, comme l'interdit de montrer dans l'espace public notre religion par des symboles. C'est pourtant pas cela non plus. Une femme a le droit de porter son voile dans l'espace public, un homme de porter sa kipa et un chrétien d'arborer fièrement sa croix. Pourtant, l'école, ce qui vaudra pour plus d'un chapitre, est une exception, car école de la République, où chacun est là pour apprendre, et pas pour montrer à tous ses convictions religieuses. Chose qui peut séparer les gens. "L'école n'est pas le lieu où se forment des clans, où les groupes religieux s'assemblent et s'opposent entre eux, où se rejouent les passions guerrières du monde", page 113.
L'auteur nous parle beaucoup du cas de l'école, étant un vaste sujet depuis bien longtemps, et surtout depuis la rentrée avec une nouvelle polémique, celle du vêtement abaya, un vêtement traditionnel féminin, long, et couvrant porté dans les pays arabes. Depuis 2004, beaucoup de questions se posent autour de la laïcité de l'Etat et de l'école. Est-ce républicain d'interdire des symboles qui marquent notre identité? Est-ce républicain de le faire "où montrer sa religion peut être associée à une logique clanesque voire à du prosélytisme, ce que l'école ne peut accepter". L'école étant " le lieu où se forme le jugement, et il n'est pas possible de le faire sereinement si l'énergie de chacun est mise au service d'une exposition revendicatrice de ses appartenances communautaires", page 113. L'auteur parle beaucoup dans son livre du cas musulman, associé à pas mal de polémiques depuis des années. La burqa, le burkini, l'abaya... La burqa ne peut être autorisée en rapport avec le fait qu'on doit pouvoir reconnaitre tout un chacun dans l'espace public. "Nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage". Loi du 12 octobre 2010 de sécurité nationale. Parfois la barrière entre l'anti-religieux, la sécurité nationale et les valeurs de la République laïque française est ténue.
La laïcité est neutre. Elle ne se prononce pas sur les confessions, et laisse ses citoyens exercer le culte qu'ils souhaitent. " La neutralité est la première condition de la laïcité", Bernard Stasi, cité page 100. Homme qui écrivit un rapport très important sur la laïcité dans la constitution en 2003, en pleine polémique quant au voile islamique. L'Etat ne subventionne aucun culte, mais veille à ce que des débordements ne surviennent pas, comme le cas des mosquées extrémistes notamment après toute la série d'attentats terroristes. La laïcité est nécessaire afin que chacun soit libre, égal et fraternel. Pour en revenir au cas de l'école, en 2013 la Chartre de la laïcité arrive à l'école. Elle stipule que "La laïcité garantit la liberté de conscience de tous. Elle permet la libre expression de ses convictions, dans le respect de celles d'autrui et dans les limites de l'ordre public". Les professeurs sont vus comme ceux étant chargés de faire appliquer ce principe fondamental. Encore une fois on dédouane un peu les parents...
Mme Bachler nous donne ensuite les exemples des différents états de l'Europe, et de leur mode de fonctionnement par rapport à la laïcité et à la religion. La plupart sont comme la France, des états sans religion d'Etat avec une laïcité certaine, tandis que d'autres, états plus scandinaves gardent encore bien leur héritage chrétien, ou comme l'Autriche, conservant un fort héritage chrétien, avec la présence de crucifix au tribunal dans les écoles... Ou alors comme l'Espagne, ayant choisi de subventionner les trois principaux cultes: protestant, juif et musulman. Tous les pays de l'Europe sont passés en revue ainsi que certains grands états du monde tels que les Etats-Unis, Chine, Inde... Cette partie est très intéressante, afin de voir les différentes positions des pays quant à la religion et à ce principe international.
L'auteur nous parle aussi du cas du Coran, très souvent mal interprété quant à cet exemple qui persiste durant le livre du voile islamique. Un symbole religieux, de piété, de pudeur, imposé ou pas, de liberté, de revendication? Qu'en est-il vraiment. Je vous invite à lire le livre, ce serait trop long. Il est en plus accessible niveau prix, pour l'épaisseur.
Comme le disait Jean Jaures " La République est laïque et sociale, elle restera laïque si elle sait rester sociale" cité page 275. En clair, respecter les autres citoyens peu importe leurs confessions.
Ce serait difficile d'en dire plus sur cet ouvrage, évoquant tellement de concepts, d'exemples, de citations, de situations qui ont vraiment eu lieu, qui ont donné lieu à de nouvelles réflexions sur l'essence même du concept de laïcité. Un ouvrage parfois un peu rebutant quant à toutes ces réflexions, mais vraiment intéressant. L'avantage est que vous pouvez parfaitement lire autre chose en alternance, pouvant s'arrêter un temps et être repris sans perdre trop le fil de la réflexion.
Grâce à cette lecture, qui m'a amenée à penser différemment, m'a appris même certaines choses, j'ai passé un bon moment de lecture, et actuellement où pas mal de quiproquos, de polémiques apparaissent dans notre République, il est important de s'informer correctement sur ce principe immatériel mais si important qu'est la laïcité, trop souvent menacée.
"La laïcité | Faire la paix" de Irene Bachler 11.90€
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