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Pleurer au supermarché

 Ce livre vraiment... Enorme coup de cœur duquel je vous parle ici. J'en avais entendu parler quelques fois en très bien sur les réseaux, je l'avais demandé en service de presse sachant qu'il parlait de la Corée, et je l'avais vu et revu dans notre bibliothèque de services de presse dans notre librairie, je me suis donc dit qu'il était temps de le lire. Franchement j'ai adoré. Commencé un mardi matin et terminé le mercredi soir, je suis passée par pas mal d'émotions durant la lecture de ce roman notamment la tristesse. 

Ce livre écrit en 2021 est autobiographique. Michelle Zauner, une jeune femme musicienne qui a fait pleins de choses dans sa vie, raconte dans ce roman traduit récemment en français, sa vie, sa double culture coréano-américaine et notamment la mort de sa mère. La première scène explique clairement le titre du roman, quasiment le même en anglais, Michelle pleure tout son saoul le deuil de sa mère, dans le supermarché asiatique où sa mère et elle faisaient les courses. Il est beaucoup question de sa mère de ce roman, cette femme coréenne ayant suivi son mari américain jusque dans une petite ville de l'Oregon, où tous deux ont élevé leur fille. De la relation que Michelle avait avec sa mère, cette femme dure avec sa fille lui reprochant de pleurer lorsqu'elle se faisait mal comme si le simple fait de s'abimer était un outrage envers sa mère qui l'avait mise au monde. Elle lui disait "garde tes larmes pour quand ta mère mourra". 

Michelle grandit au sein de cette double culture, ne parlant à peine coréen, ayant suivi quelques cours de coréen les vendredis soirs pour faire plaisir à sa mère, mais qu'elle séchait régulièrement, effaçant la partie coréenne de sa personne pour mieux se fondre dans la masse. Etant considérée comme asiatique aux Etats-Unis mais étrangère lorsqu'elle se rendait en Corée avec sa mère. Pas assez coréenne et pas assez américaine. Ce sentiment qui doit tirailler beaucoup de personnes issues d'une double culture. Elle raconte ses quelques voyages chez ses tantes et sa grand-mère à Séoul, la difficulté de communication avec sa famille coréenne, son niveau ne lui permettant pas d'avoir des discussions. Heureusement une de ses tantes, la seule ayant fait des études supérieures parlait très bien anglais et pouvait mieux communiquer avec elle. Elle raconte l'importance de la nourriture dans sa vie, qui lie Michelle avec ses racines coréennes. Comment se retrouver autour d'un repas, sans besoin de parler la même langue. 

Elle nous raconte les virées au supermarché asiatique le H Mart, toujours situé dans une zone industrielle des villes américaines, endroit où se retrouvaient toutes les minorités asiatiques afin de se reconnecter avec leurs pays d'origine. Ces moments mère-fille où elles allaient faire les courses pour la semaine, puis manger des spécialités coréennes dans des restaurants coréens de la même zone industrielle. Où tous ces asiatiques attendaient leurs plats qui les rapprochera de leurs origines. Comment Michelle a grandi entourée de plats coréens avec quelques mots de la langue d'origine de sa mère qu'elle comprenait, vivant aux Etats-Unis, avec un père coréen, une culture très américanisée. 

Ces moments en Corée ont été très émouvants pour moi à lire, parlant d'endroits que je connais comme le fameux Gwangjang market de Séoul, un très grand marché connu où l'on peut manger toutes les spécialités coréennes. J'avais l'impression de voir la scène, sentir les odeurs, goûter les saveurs, j'ai quasiment pleuré en lisant sa découverte de son pays d'origine avec ensuite Busan, la seconde ville coréenne située au sud est, puis la magnifique île de Jeju avec notamment la mention d'une cascade où je suis allée. L'impression de lire en quelques lignes un rapide résumé de mon année en Corée. Bref revenons à nos moutons.

Le père de Michelle est un homme ayant vécu plusieurs vies durant sa jeunesse ayant été un drogué, alcoolique, ayant fait de la prison, un homme avec lequel elle ne partage pas grand chose, avec lequel elle va pourtant devoir communiquer lorsque sa mère apprend qu'elle est malade. Une grande partie du roman concerne la maladie de sa mère, et comment père et fille, tantes et autres amies de Chongmi la mère de famille, s'unissent dans l'adversité. Notre Michelle ayant eu un début de vie adulte assez chaotique à jongler avec des petits boulots à Philadelphie, vie où elle a suivi ses études secondaires, revient alors dans la maison de son enfance à s'occuper de sa mère où elle y restera des semaines. Elle apprend à cuisiner grâce à une coréenne youtubeuse qui propose des recettes de son pays, Michelle devient alors une aidante pour celle qu'elle a toujours eu du mal à cerner, et à créer un vrai lien.

Pourtant les souvenirs sont là. Les séjours en Corée à aller au marché aux poissons de Noryangjin, et à goûter ensemble des saveurs auxquelles Michelle n'est pas accoutumée, la mère souhaitant que sa fille goûte à tout afin de se faire un avis. Les rendez-vous au sauna mère-fille, où toutes les coréennes se baladent nues, l'occasion pour elles de purifier leurs corps et se reposer. Les regards des femmes la jaugeant comme étrangère, mais étant considérée comme jolie en Corée mais guère jolie aux Etats-Unis. La difficulté pour Michelle de trouver sa place et d'embrasser à bras ouverts la richesse de sa double culture. Rejeter certaines choses qu'elle regrettera ensuite. 

On suit donc la vie de Michelle de son enfance avec des souvenirs, au moment de deuil qu'elle vit, puis des années ensuite à habiter New-York et à embrasser sa carrière de musicienne, de laquelle elle a essayé de se rapprocher durant de nombreuses années. Malgré ce rejet de sa partie coréenne, sa mère ayant toujours cuisiné coréen, cela a formaté Michelle à être familière de son pays d'origine. Il est beaucoup question de la description de plats coréens dans le livre, moments qui m'ont rappelé pas mal mon année là-bas. Elle nous parle de Peter, son mari qui l'a aidée durant la maladie et à accepter le deuil. Elle se livre entièrement dans un récit touchant. 

Les mots en coréen écrits dans notre alphabet en romanisé m'ont bien fait rire, peu habituée à voir écrit des mots de coréen dans notre alphabet, entre les quelques mots échangés entre Michelle et sa famille coréenne et les rares mots que notre héroïne connaît. La mort de son halmeoni (grand-mère), puis celle de sa tante confrontent notre future musicienne à la mort, et à la culture de celle-ci en Corée où elle est née. Puis la maladie de sa mère vont remettre énormément de choses en perspective.

Difficile d'en dire plus et de ne pas en dire plus à la fois sur ce roman que j'ai vraiment adoré parlant de la difficulté de trouver sa place, de la double-culture, de la Corée, de la maladie, de la mort, de pleins de sujets qui peuvent parler à beaucoup de monde. Une lecture addictive qui m'a bouleversée et que je vous recommande à 1000%. 



"Pleurer au supermarché" de Michelle Zauner, 22€

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