Premier roman de cette rentrée littéraire hivernale que je lis, l'ayant reçu récemment, et ayant eu envie de lire quelque chose de moins connu, moins médiatisé, me permettant également de continuer de découvrir l'univers de Carmen Bramly que j'avais découvert lorsque j'avais 17 ans avec son premier roman "Pastel fauve". Ecrit lorsqu'elle avait seulement 16 ans, j'avais adoré son premier roman, m'ayant fortement encouragée à découvrir au fur et à mesure ses autres romans. Il ne m'en manque actuellement qu'un seul à découvrir, ce que je compte faire. Lorsque j'ai donc vu son nouveau roman à paraître, j'avais hyper hâte, n'étant pas aussi connue que beaucoup d'autres, mais ayant un style qui me plaît particulièrement, vrai reflet de sa génération. C'est donc le premier que j'ai lu toute fin d'année, quasiment lu d'une traite.
Pour son cinquième roman, Carmen Bramly choisit le milieu de la publicité. Paloma a 24 ans, travaille en tant que freelance dans l'agence ATK à Pantin, immense immeuble contenant 900 employés. Ayant quitté les bancs de la fac pour rejoindre cette agence lors d'une opportunité professionnelle proposée par Margot Wilson, l'une des têtes pensantes de l'agence, elle a sauté sur l'occasion. Cette agence est réputée, travaille pour de grandes entreprises, pourtant Paloma ne gagne que le smic, sa condition de jeune recrue sans être en CDI est précaire mais qu'importe. Elle appartient à la grande famille ATK qui fait rêver de par ses slogans racoleurs et sophistiqués, suscitant l'envie chez le consommateur. Voitures, parfums, bijoux, vêtements, Paloma est conceptrice-rédactrice, chargée d'imaginer des campagnes, des slogans, tout un tas de contenus pour aider les marques à être visibles. Un travail très prenant, qui lui prend souvent ses soirées, ne lui laissant que peu de temps libre. Temps libre qu'elle occupe sur ses applications de rencontre, obsédée à l'idée d'avoir des relations physiques avec des hommes qu'elle enchaîne, ne s'attachant pas mais ayant ce besoin maladie elle le dit elle-même d'être possédée et qu'on lui fasse mal.
Aidée et formée par Benjamin, son mentor, un homme charismatique, tous deux travaillent sur tout un tas de projet fournis par celle qu'ils appellent la Reine Margot une femme à l'allure royale. Les jours passent au sein de cette agence, véritable reflet de la société entre le tiers-état, le clergé et et la noblesse, elle-même représentant le tiers-état, se voyant confier beaucoup trop de taches par rapport à ce qu'elle peut faire, le service RH et compta représentant le clergé, en quelque sorte chargé de chapeauter tout ce petit monde, et les directeurs artistiques, Margot et les chefs de l'agence étant la noblesse. On en apprend plus sur la vie d'une agence de publicité, faisant perdre des points de karma à notre protagoniste, qu'elle contrebalance en étant une fille bien. En effet son travail consiste à faire rêver le consommateur à tout prix, à lui en mettre plein les yeux quitte à mentir. En soi réfléchit-elle son travail n'a aucune nécessité en ce monde. Pourtant elle est là fidèle au poste, toujours prête à créer avec son fidèle allié Benjamin. Elle enchaîne les idées, les idées de slogans, étant douée et efficace.
Quand le jour où Benjamin est accusé de harcèlement sexuel par la stagiaire sur une méprise, le monde de Paloma change du tout au tout. Elle veut le contacter pour lui envoyer force et courage mais n'ose le faire. Il est désormais chez lui en télétravail, et l'entreprise fait comme si de rien n'était, spécialiste de faire semblant, car après tout c'est un peu le credo de ces créateurs d'envies. Seule Salomé le soutient, n'hésitant pas à crier haut et fort sa colère. Paloma est d'accord mais n'ose la dire tout haut, les langues s'étant déliées sur une plateforme telle que balance ton porc mais version entreprise. Anaïs la stagiaire responsable de ce branle-bas de combat s'affiche la tête haute, chacun la considérant comme une héroïne, ayant réussi à faire tomber un homme de son piédestal. Paloma ne dit rien mais n'en pense pas moins, encouragée par Salomé à écrire un mail à la Reine Margot afin de nettoyer l'image ternie de Benjamin.
Comment survivre dans cet univers féroce et impitoyable de la pub sans son allié le plus cher? Sans cet homme qui lui est très cher? Désormais elle n'a plus accès à la cantine que lui payait son acolyte, elle n'a plus personne à qui parler, sa foi en ce monde s'étiole. Elle continue ses rendez-vous masculins sans lendemain afin de décider, aidée par Norma une collègue directrice artistique de se prendre en main. Elle continue diligemment de faire ce qu'on lui demande, approchant à grands pas de ses deux ans d'ancienneté, avec pourquoi pas l'idée de se stabiliser au sein de l'agence? De faire véritablement partie de cette famille branlante mais de laquelle elle veut faire partie. Malgré la crise, moins de budget des marques pour le service marketing et les campagnes, le trop plein de stress qui fait démissionner ses salariés, ATK représente tout de même pour Paloma la maison.
Une vraie plongée dans un univers superficiel et faux avec beaucoup de transparence et d'honnêteté entre les bons aspects du métier mais également ses inconvénients comme les horaires à rallonge, la surcharge de travail, le turn-over incessant, les employés prêts à tout pour réussir... Par le biais de Paloma à peine sortie de la fac on a un regard neuf, critique mais également naïf sur le métier, sur une situation injuste venant tout ébranler. J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman quasiment d'une traite, en ayant appris bien plus sur cet univers de la pub. Un roman fort, honnête, que je vous encourage vivement à découvrir.
"Tout est chaos" de Carmen Bramly, 21€
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