La semaine suivante après avoir lu "La végétarienne", j'ai enchaîné avec "Leçons de grec" sorti dans la foulée que j'ai directement emprunté afin de le lire. Voulant continuer de découvrir la bibliographie de Han Kang prix Nobel de littérature 2024, j'avais très hâte de le découvrir avant de lire son tout nouveau recueil de poésie.
Dans ce court roman de moins de 200 pages, les romans de Han Kang ne sont jamais très longs, "Impossibles adieux" l'est un chouia plus, on suit le point de vue de deux personnages, un homme et une femme. Chacun âgé d'une quarantaine d'années, ils se rencontrent lors d'un cours de grec ancien qu'enseigne l'homme. La femme est une de ses élèves, et tous deux ont une sorte de handicap qui leur embête bien la vie mais avec lequel ils n'ont pas de choix que de vivre. L'homme perd la vue, tandis que la femme ne parle plus.
Pour l'homme, ils 'agit d'une réelle maladie, tandis que pour la femme, suite à son divorce et à la perte de la garde de son fils, ce traumatisme lui a fait perdre l'usage de la parole. La femme ne voit quasiment plus son fils? vivant avec son père, celui-ci ayant insisté lors de la décision de garde sur le fait que son ex-femme n'était pas stable, ressortant le fait qu'à son adolescence elle a été internée à l'hôpital psychiatrique. Elle était très taiseuse et vue comme bizarre par ses camarades. De plus, elle ne gagne pas d'argent et vit dans des conditions précaires, il a donc été décidé que pour le bien de l'enfant encore jeune, il vivrait avec son père et qu'il verrait sa mère un jour toutes les deux semaines.
Notre héroïne féminine, a toujours eu un fort intérêt pour les langues anciennes comme le grec qu'elle apprend dans le récit présent, mais aussi pour les langues vivantes comme l'anglais et le français, qu'elle a apprises plus jeune. Fascinée par la linguistique, le premier mot auquel elle a pensé est "bibliothèque" qui lui est venu spontanément. Elle a appris la langue coréenne seule au début de son enfance, littéralement passionnée par les caractères coréens, le "hangeul", par exemple comme la composition du mot forêt en coréen s'écrivant "숲", "soup" voyant en sa structure, une base solide et magistrale, semblable à celle d'un arbre. On a même des mots écrits en hangeul dans le récit, pour être au plus proche de l'héroïne. Elle prend du coup chaque semaine, des cours de grec ancien, cours suivi par un large panel de personnes: un homme dans la quarantaine, un étudiant en philosophie et d'autres pouvant participer verbalement, tandis qu'elle écoute attentivement.
Quant à notre héros masculin, dont on ne sait pas le nom non plus, handicapé par sa vue le fuyant, il est donc professeur de grec ancien. Ayant habité des années durant plus jeune en Allemagne avec sa famille, il a ensuite décidé de revenir vivre en Corée. On a le récit de certains cours de grec? qui nous permettent d'en apprendre plus sur cette langue morte inventée il y a plus de 2000 ans, comme le fait que les mots "souffrir" et "apprendre" s'écrivent quasiment pareil. Comme s'il fallait nécessairement souffrir pour apprendre. Notre professeur est assez fasciné par la femme de 40 ans suivant son cours mais n'ouvrant jamais la bouche, persuadé qu'en plus d'être muette, elle est sourde. Plusieurs interactions entre eux seront recensées dans lesquelles il l'interpelle ou au contraire s'excuse de son attitude.
L'homme se rappelle d'un ami alors qu'il était adolescent lorsqu'il vivait en Allemagne, un ami malade finalement décédé peu de temps après, au courant de la perte de vue de notre héros et l'ayant fortement encouragé à commencer à apprendre à marcher avec une canne, à apprendre le braille et à se faire aider d'un golden retriever. Conseils qu'il n'a pas écoutés, et des années plus tard se retrouvant bien handicapé lorsqu'un incident survient. Une sorte d'attirance les liait, tout au long du récit notre héros s'adressant à lui en lui disant "tu", on comprend finalement à qui il parle.
Le récit est très dans la lenteur, la poésie, la linguistique, le handicap, la perte pour ses deux individus, les rapprochant inévitablement. Le style est semblable de celui qu'on retrouve dans "Celui qui revient" de la même autrice, "Impossibles adieux" également même si ces deux-ci sont plutôt concentrés sur le devoir de mémoire, tandis que celui-ci aborde d'autres sujets, mais toujours dans une certaine forme de mélancolie et de lenteur.
Un court roman se lisant rapidement mais que j'ai essayé de savourer de par sa poésie, et la beauté de la langue, sujet très important dans le récit, l'une passionnée par les langues, tandis que l'autre enseigne une langue morte et difficile.
"Leçons de grec" de Han Kang, 7.90€
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